Peace Moby !

Publié le par RabbA

C’est officiel, Moby sortira son cinquième album en dehors des Etats-Unis, le 14 mars, (6 jours plus tard sur son territoire), avec la sortie d’un premier single le 28 février. Hotel, le nom de ce nouvel opus promet, d’après l’artiste, d’être éclectique, mais sans intégration de samples vocaux qui ont fait le succès de Play et de 18, ses deux derniers albums. 10 morceaux sur les 14 bénéficieront de la voix de Moby et 2 seront accompagnés de la chanteuse Laura Dawn. Compositeur de paysages sonores, balançant d’une douce électro humaniste à un punk violent anti-conformiste, Moby "se fout de savoir s’il est en avance ou pas, la seule chose qui l’anime est de faire de la musique, sa seule philosophie de vie"(*). Telle est donc la devise de Richard Melville Hall, né un 11 septembre 1965. Celui qui a choisi son nom de scène parce qu’Herman Melville, l’écrivain du roman Moby Dick, était son arrière arrière grand oncle, a évolué toute son enfance dans un univers hippie ouvert à toutes les drogues, toutes les musiques et propice à l’évolution de son karma….no pression, man ! Cool ! 

 

Moby est un adepte du "bedroom album" (composition at home, tranquille) et avait, de toute façon, le feu artistique en lui. Elizabeth Hall, sa mère, élève seul son fils qui n’avait que deux ans (en 1967), quand son père, James Hall, meurt dans un accident de voiture. Moby n’a jamais cru à cette thèse : "Il avait seulement 26 ans, en avait marre de la vie, et l’on pense que son accident de voiture était en fait un suicide." Sa mère, veuve à 23 ans,  repart de New York avec son fils vivre chez ses parents, à Darien, dans le Connecticut. Suivant la mouvance hippie, elle embarque son jeune enfant, en 1969, dans une communauté à Haight-Asbury à San Francisco. Puis, 7 ans plus tard, dans une autre communauté de musiciens de Stratford, dans le Connecticut. Sans surprise, l’univers psychédélique de la drogue côtoie le jeune Richard. Il dira plus tard : "Ma mère a tellement gobé d’acides quand elle était enceinte de moi que je suis naturellement défoncé". Son troisième album, Animal Rights (image de droite), mélange de post-punk et de techno, dévoile une pochette noire et blanc célébrant la nativité : celle du bébé Moby à peine âgé de deux mois, tenu dans les bras de son grand-père. A 10 ans, il commence à jouer de la guitare en même temps qu’il consomme du cannabis et diverses pilules psychoactives et champignons hallucinogènes.

 

De cette époque, il gardera "un certain engagement pour la liberté d’expression, pour l’égalité des droits entre les hommes, pour les respect des animaux et de l’environnement". Everything Is Wrong, son deuxième opus, né le 14 mars 1995, contient un livret détaillant ses sentiments et réflexions: La première page est une critique de nos sociétés modernes. Nous vivons entourées de plastique et de métal froid, de bois reconstitué après des déforestations sauvages, d’asphalte empoisonnant, de peintures toxiques, de tortures animales, de viande rouge sanglante (carnivore que nous sommes !), de pots d’échappement polluants, de cigarettes (sa mère est morte d’un cancer du poumon en 1997) et de drogues mortelles, de déchets toxiques rejetés et du nucléaire inutile et dangereux. "Ce que je prêche ici, c’est une approche sensible, pragmatique et non destructive de notre existence. Moby ne perd pas une occasion dans ses albums et interviews d’exprimer ses craintes face à ce monde qui s’auto-détruit. Sa conversion au catholicisme à 20 ans n’a rien d’anodine. Après avoir été athée, puis agnostique, il se dirige vers les religions orientales avant de découvrir le Nouveau Testament. Il est l’un des rares artistes à ne pas cacher ses croyances religieuses, même s’il avoue être encore gêné d’avoir été présenté comme un chrétien conservateur au début de sa carrière. Á dénoncer tous ces "bigots intolérants" (*), toujours dans Everything is Wrong, il déclare : "L’American way d’avidité, de cruauté, de destruction de l’environnement, de racisme, de sexisme, d’homophobie… n’a rien à voir avec le Christ. Il est merveilleux, aimant et plein de compassion". Avec une croix tatouée sur le cou, Moby compare ses compositions avec des actes de foi à part entière. "La première chose que Dieu fit, c’est de créer. Des actes de création absolus et spectaculaires. C’est presque une insulte pour nous que d’être aussi timides". (*)

 

Enfin, toujours est-il que ses deux derniers albums sont d’une créativité et d’une originalité rares. Play, sorti le 1er juin 1999, est une myriade de sons provenant de tous les styles de musique nés au 20ème siècle. L’inventivité réside dans l’intégration en samples de chants de blues enregistrés par l’ethnomusicologue, Alan Lomax. Honey, Run On et Natural Blues sont autant de retour aux sources de la musique populaire noire, le gospel omniprésent, sublime ces rythmes électros et, en fin, la dernière de l’album Play, My Weakness, reprend un chant choral inspiré d’un chant africain. Un album peace & love vendu à plus de 9 millions d’exemplaires, 9 millions de personnes qui ont entre leurs mains le livret où Moby écrit ses réflexions sur les fondamentalistes religieux, le traitement des prisonniers, son végétarisme et l’holocauste. De quoi toucher du monde. Il rempile, enfin, avec 18, même formule efficace, même émotion et un titre qu’il explique d’une manière peu orthodoxe, car, bien que l’album comporte dix-huit titres, il ajoute que "ceux qui ont déjà passé du temps en Israël ou qui s’intéressent aux théories de la conspiration impliquant les extra-terrestres trouveront la signification". (*) Bon, on n’est pas beaucoup éclairé…mais cet opus est d’une extrême qualité, riche en influences diverses et en voix féminines posées.

 

Le 11 septembre 2001, il fête son anniversaire sur le toit de son immeuble et assiste, en première loge, aux attentats du World Trade Center. Inspiré par cet événement, il composera par la suite le titre Sunday (the day before my birthday). Voilà le Moby, fils d’une hippie, et d’un père peut-être suicidé, porte-parole des végétariens, des écologistes, des défenseurs des animaux et d’une musique ouverte à tous les styles, riche en émotions et en surprises. Les messages passent, Moby passe et les critiques aboient. Gageons que ce cinquième album, Hotel, réservera de belles surprises.

 

RabbA

* Moby de A à Z, de Jean-Michel Oullion. Les Guides MusicBook. 

                    

 

 

Publié dans Cultura !

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article