2ème jour au Liban

Publié le par RabbA

Jeudi 08 décembre 2005

Le lendemain matin, Hassan et moi partons en direction du site de Baalbek, 83 km vers Damas, en Syrie, direction Nord-Est. À travers des routes sinueuses, nous passons de l’autre côté du Mont Liban, et se dévoile, immense et majestueuse, la vallée de la Bekaa, délimitée par l’autre chaîne de montagne, située à l’Est, l’Anti-Liban. Hassan m’informe qu’à l’école primaire, les professeurs apprennent aux élèves qu’un tremblement de terre est à l’origine de la séparation des deux montagnes et de la création de cette vallée. Occupant la quasi moitié du territoire, cette plaine assure la grande majorité de l’élevage et des cultures sont produites dans le pays. Lait, fromages frais, miel, confitures, tout au long de la route, des échoppes et restaurants vendent leurs produits alimentaires 100% naturels. C’est aussi l’éloignement progressif de Beyrouth, une vie rurale, des maisons disséminées dans de petites villes. La présence militaire reste forte à certains endroits, des postes de contrôle s’égrènent sur la route où, parfois, n’est campé qu’un seul soldat vaguant à ses occupations ou regardant dans le vide, juste là, au cas où… Hassan se fait vérifier ses papiers à mi-chemin, sans encombre, et nous arrivons à Baalbek vers midi. Un site archéologique, mais aussi le nom de la ville, Baalbek, connue aussi comme un des anciens bastions du Hezbollah. Elle est aujourd’hui accueillante, envahie de ruines laissées par l’histoire, tout autour de nous, des pierres posées dans l’herbe repoussée, des moitiés de colonnes, vestige des installations et invasions successives et des tremblements de terre. Le prestigieux site archéologique se situe en plein cœur de la ville et s’étend sur des centaines de mètres carrés. Véritable mixage des concepts architecturaux orientaux et gréco-romains, ce grand sanctuaire a été réaménagé et agrandit par l’empereur romain Auguste quand la ville s’appelait encore Héliopolis, la Cité du Soleil. De l’an 16 avant Jésus Christ, les travaux se sont prolongés jusqu’à la fin du 2ème siècle. Je passe la vaste entrée des Propylées (construction pré-romaine), traverse la cour hexagonale avec son autel et ses bassins, déambule dans le Temple de Jupiter et ses fameuses 6 colonnes alignées, puis le Temple de Bacchus, sur la droite, encore debout, avant d’observer des vestiges de constructions arabes juste derrière et de finir près du Temple de Vénus. Chaque été, le silence est interrompu pour accueillir des artistes du monde entier dans les ruines mêmes. Je regrette ici en décembre pour louper un événement de cette ampleur dans un contexte fantastique. Le Festival de Baalbek, c’est chaque année des orchestres, des chanteurs d’opéra et des cantatrices renommés, Béjart et sa troupe de danseurs s’y sont déjà produits, même Johnny Hallyday, en 2003, dans le Temple de Jupiter ! Plus classe que le Stade de France… 

 

Sur la route du retour, Hassan me propose de faire une escale à Zahlé, ville à dominante chrétienne dans les montagnes, à seulement une trentaine de kilomètres de Beyrouth. Un ami à lui nous rejoint, Tony, tenant ici un magasin de vêtements et un second dans la capitale. La faim nous tiraillant Hassan et moi, nous nous laissons entraîner dans l’un des hôtels restaurants les plus prisés de la ville, le Monte Alberto, en hauteur. Assis à une table contre la fenêtre, la vue est superbe. Tout en bas, à bien 100 mètres de dénivelé, une rivière coule, et Tony me décrit l’atmosphère agréable qu’il y règne l’été, il aime sa ville. "Tu vois Fabien, l’été, les cafés posent des tables le long de cette rivière, à l’ombre de la montagne, et pleins de gens viennent boire un verre et se rafraîchir. En même temps, nous mangeons comme des princes, du fatouch, de l’houmos, différents plats de viande, le tout arrosé de Pepsi. La gastronomie libanaise se résume en trois mots : fraîche, aromatisée et délicieuse, sa réputation dans le monde entier n’est pas usurpée. Hassan prend un narguilé. À la fin du repas, sur une table au fond, un homme d’une cinquantaine d’années, entouré d’amis, se met à chanter en arabe, sa voix grave résonne dans tout le restaurant. Mes oreilles savourent autant que mon palais, le café libanais, puissant car cuit pendant des heures, relègue l’espresso italien à l’école maternelle. Tony revient sur sa chère ville de Zahlé qui, m’explique-t’il, présente la particularité d’avoir des toits rouges. C’était plus visible avant la guerre mais les bombardements en ont détruit une grande partie, tous n’ont pas été reconstruits aujourd’hui. La guerre, peu ne l’évoque car faisant partie du passé, je prends cela comme une leçon, nous qui passons notre temps à ruminer un quotidien bien moins grave que l’horreur de la guerre.

Nous retournons ensuite dans le magasin, où je salue le père de Tony, petit monsieur très souriant. Il parle aussi français. Je prends un haut noir pour une copine, Tony me fait une belle ristourne, puis sa mère arrive, elle reste plus longtemps. On sort de quoi s’asseoir autour de la caisse, le café libanais est en préparation et les trois discutent en arabe. La mère de Tony a l’air très dynamique, petite et mince, les cheveux teints en auburn, tirés en arrière, un visage certes âgé mais éveillé, elle allume une cigarette quand l’odeur forte et savoureuse annonce le café. On le sert dans de toutes petits tasses car il est chauffé pendant des heures, très fort, donc. Je garde sur la langue ce goût savoureux, aromatisé  à la cannelle. Ce soir, c’est la fête. Vers 20h00, direction le quartier d’Achrafieh à Beyrouth, chez le colocataire de Tony, Ali. Situé sur une colline, ce coin de la capitale contient encore les derniers spécimens d’une architecture libanaise en voie de disparition. Certains immeubles sont encore criblés de balles car ce quartier bordait la ligne de démarcation entre les deux secteurs de la ville. L’appartement, au rez-de-chaussée, semble assez vaste, avec d’abord, sur la gauche une cuisine, puis à droite, une grande pièce servant de salle à manger et de salon… un canapé et plusieurs fauteuils, les places assises ne manquent pas, preuve de l’hospitalité des habitants. L’ensemble est quelques peu tendance, minimaliste, un brin d’excentricité, mais toujours discret et chaleureux. La discrétion, dans ce pays… Première question : "Alors, tu aimes le Liban ?" Oui, je ne suis arrivé qu’hier mais (en désignant Hassan) on a été déjà été à Harissa et dans Beyrouth. On boit deux ou trois whisky coca, tranquilles, quelques cigarettes, Hassan se fait un narguilé et zappe la télé avec une préférence pour Mélody Arabia, montant le son lorsqu’un un morceau lui plait, le descendant pour échanger trois mots en arabe avec Ali. Celui-ci travaille dans une banque le matin et au magasin d’Ali, situé dans le même quartier. Deux heures doivent se passer quand nous repartons dans le quartier de Sin El Fil, au Club OM, Orange Mécanique. Bonne musique arabe, électro et ambiance plutôt jeune et très festive, l’alcool coule à flots…

RabbA

Publié dans Around The World

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R
Donc le premier jour si je comprends bien ce fut sucré a souhait cochon.<br /> roland malkoun. 
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